Quid des e-mails du médecin du travail postérieurs à l’avis d’inaptitude

10 février 2021 | Actus

Ils peuvent étayer l’impossibilité de reclassement!

Après une déclaration d’inaptitude, les échanges entre l’employeur et le médecin du travail sur des postes disponibles en vue d’un éventuel reclassement sont précieux. En cas de contentieux ultérieur, l’employeur peut les utiliser pour étayer l’impossibilité de reclassement, même si ce sont de simples courriels. C’est ce que souligne la Cour de cassation dans un arrêt d’espèce du 6 janvier 2021.

Rappels sur l’obligation de reclassement en cas d’inaptitude

Sauf cas particulier, quand un salarié est déclaré inapte à son poste de travail, l’employeur doit rechercher un nouvel emploi approprié aux capacités du salarié parmi les postes disponibles, compte tenu des conclusions écrites du médecin du travail et après avis du comité social et économique, s’il en existe un (c. trav. art. L. 1226-2 et L. 1226-10). Un licenciement n’est justifié que si l’employeur est en mesure de justifier de l’impossibilité de reclasser le salarié, ou du refus par ce dernier d’un poste compatible (c. trav. art. L. 1226-2-1 et L. 1226-12).

Après la déclaration d’inaptitude, avant de proposer des postes disponibles, l’employeur peut le cas échéant solliciter le médecin du travail pour s’assurer de leur concordance avec la « nouvelle aptitude » du salarié.

Dans tous les cas, les réponses apportées par le médecin du travail sur les possibilités éventuelles de reclassement peuvent concourir à la justification par l’employeur de l’impossibilité du reclassement (cass. soc. 15 décembre 2015, n° 14-11858, BC V n° 259 ; cass. soc. 3 mai 2018 n° 17-10234 D).

Cependant est-ce qu’un simple courriel du médecin du travail concourt valablement à la constitution de cette preuve ?

C’est à cette question que répond la Cour de cassation. On soulignera que si la présente décision concerne une inaptitude d’origine professionnelle, son principe peut être étendue à l’inaptitude d’origine non-professionnelle.

Litige sur la justification de l’impossibilité de reclassement

Dans cette affaire, un salarié embauché en qualité de conducteur livreur avait été déclaré inapte suite à un accident du travail. Il avait ensuite été licencié le 19 mai 2014 en raison de l’impossibilité de possibilité reclassement au sein de l’entreprise.

Considérant que son licenciement était injustifié, il avait saisi la justice en arguant d’un manquement de son employeur à l’obligation de reclassement, car tous les postes disponibles ne lui avaient pas été proposés.

Pour sa part, l’employeur argumentait qu’après la déclaration d’inaptitude du salarié, il avait sollicité le médecin du travail sur deux postes disponibles pour un éventuel reclassement. Ce dernier avait alors indiqué que le premier des postes était plus adapté, puis après une deuxième sollicitation de l’employeur, avait précisé par courriel que le second poste (conducteur ZC SPL) n’était pas compatible avec les restrictions actuelles du salarié.

Les juges d’appel avaient donné gain de cause au salarié en retenant :

-que l’employeur n’avait pas proposé le poste de conducteur ZC SPL ;

-que le courriel du médecin du travail, selon lequel ledit poste n’était pas compatible avec les restrictions du salarié, ne constituait pas un avis et n’avait pas été porté à la connaissance du salarié

À tort, puisque la Cour de cassation casse le jugement.

L’employeur peut s’appuyer sur des réponses a posteriori du médecin du travail

Sans surprise, la Cour de cassation confirme une jurisprudence établie : « les réponses apportées postérieurement au constat régulier de l’inaptitude, par le médecin du travail sur les possibilités éventuelles de reclassement concourent à la justification par l’employeur de l’impossibilité de remplir cette obligation ».

Les juges d’appel ne pouvaient donc pas exclure d’office le courriel du médecin du travail, que l’employeur pouvait donc invoquer pour justifier de l’impossibilité de reclassement.

L’affaire sera donc rejugée.

Cass. soc. 6 janvier 2021 n° 19-15384 D

(source rf)

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