Projet important : consultation et expertise

7 juillet 2021 | Actus

Dans les entreprises d’au moins 50 salariés, lorsque l’employeur envisage de mettre en place un projet important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail, il doit consulter les représentants du personnel, qui de leur côté ont la possibilité de recourir aux services d’un expert pour les aider à rendre leur avis. Une décision, rendue sous l’égide du CHSCT, nous permet de faire le point sur le régime applicable au CSE en termes de projet important, consultation et expertise.

Projet important et consultation

Le CHSCT était, selon l’article L. 4612-8-1 du Code du travail, « consulté avant toute décision d’aménagement important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail et, notamment, avant toute transformation importante des postes de travail découlant de la modification de l’outillage, d’un changement de produit ou de l’organisation du travail, avant toute modification des cadences et des normes de productivité liées ou non à la rémunération du travail ».

Ce texte abrogé en 2017 par les ordonnances Macron, est devenu l’article L. 2312-8 du Code du travail en transférant la consultation du CHSCT vers le CSE, visant notamment « tout aménagement important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail ».

La notion d’aménagement important ou projet important a été définie par les tribunaux.

L’enjeu est de taille car il conditionne le droit à consultation mais également celui à expertise du CHSCT, devenu CSE.

La première question à se poser est de savoir s’il s’agit d’un projet.

Telle que définie par les tribunaux, cette notion renvoie à un projet abouti et formalisé. La difficulté surgira des actes préparatoires qui, sans être aboutis, démontrent une volonté certaine d’agir dans un délai déterminé.

Une expertise votée trop tôt pourrait ne pas avoir le résultat escompté.

La seconde question relève du caractère important ou non dudit projet.

Si dans un premier temps la Cour de cassation retenait comme critère le nombre de salariés concernés, tel n’est désormais plus le cas. Pour être important le projet doit être de nature à modifier les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail des salariés. C’est donc l’impact sur les salariés que les tribunaux analysent.

Dans l’affaire que nous allons étudier, un employeur procède à diverses informations du CHSCT sur un projet de déménagement des locaux. Ce dernier, considérant qu’il s’agit d’un projet important, vote le recours à une expertise, sans attendre la phase de consultation.

L’employeur conteste et saisit le tribunal aux fins d’obtenir l’annulation de la délibération du CHSCT. Il obtient gain de cause, le juge considérant qu’à ce stade il est prématuré de qualifier le projet de déménagement de « projet important ».

La Cour de cassation censure, reprochant au juge de première instance de violer les textes alors qu’il constate lui-même que le processus décisionnel est acquis et que l’employeur convient qu’il s’agit à terme d’un grand projet immobilier ayant pour effet de modifier les conditions de travail des salariés (redistribution significative des espaces de travail et de leur usage pour les salariés concernés).

Il convient de préciser qu’entre-temps la fusion des IRP est intervenue, ce qui explique la reprise de l’instance par le CSE.

Reconnaissance du projet important : expertise de droit

En cas de projet important l’expertise est de droit.

Si l’employeur conteste, il devra démontrer qu’il ne s’agit pas d’un projet important. Il éprouvera sans doute quelques difficultés s’il a lui-même présenté le projet en information/consultation.

Dans notre affaire, la seule question posée est donc celle de l’existence ou non d’un projet important. Le juge n’a pas à décider de la pertinence de l’expertise, elle est de droit à partir du moment où l’existence du caractère important du projet est reconnue.

Ce que rappelle la Cour de cassation en réformant le jugement.

Prise en charge financière des frais d’expertise

S’agissant du CSE, cette question n’a plus lieu d’être. Les compétences du CHSCT ayant été fusionnées au sein du CSE qui bénéficie d’un budget de fonctionnement, une partie des frais de l’expertise pour projet important est désormais à la charge du CSE à hauteur de 20 %, sauf accord entre les parties, ou en cas d’insuffisance du budget de fonctionnement. Dans ce dernier cas, l’employeur prend en charge la totalité des frais d’expertise, à la condition toutefois que le CSE n’ait pas procédé à un transfert d’excédent annuel de budget vers les activités sociales et culturelles au cours des trois années précédentes.

Rappelons que le transfert de budget est limité à 10 % de l’excédent annuel. Il peut se faire du budget de fonctionnement vers celui des activités sociales et culturelles, et inversement. Retrouvez plus d’explication sur ce sujet dans notre documentation « Comité social et économique : agir en instance unique ». 

Cour de cassation, chambre sociale, 12 mai 2021, n° 19-24.692 (le recours à un expert est justifié dès lors que le processus décisionnel relatif au regroupement et au déménagement des salariés était acquis et que les sociétés convenaient que le projet serait à terme un grand projet immobilier ayant pour effet de générer une redistribution significative des espaces de travail et de leur usage pour les salariés concernés)

(source  TISSOT éditions)

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