En imposant à l’employeur qui licencie pour inaptitude d’indiquer les motifs qui s’opposent au reclassement du salarié, le code du travail pose un principe de portée générale. Néanmoins, pour la Cour de cassation, le bon sens commande d’écarter cette obligation lorsque le salarié inapte a reçu des propositions de reclassement et les a déclinées.
Rappel du cadre légal du reclassement en matière d’inaptitude
Lorsqu’un salarié est déclaré inapte à son emploi par le médecin du travail, l’employeur doit d’abord chercher à le reclasser, que cette inaptitude soit d’origine professionnelle ou non.
Si l’employeur est dans l’impossibilité de proposer un autre emploi au salarié, il lui fait connaître par écrit les motifs qui s’opposent au reclassement (c. trav. art. L. 1226-2-1 et L. 1226-12).
Il ne peut licencier le salarié que dans l’une des trois situations suivantes (c. trav. art. L. 1226-2-1 et L. 1226-12) :
-il n’y a pas de possibilité de reclassement, autrement dit il n’y a pas d’autre emploi approprié à ses capacités au sein de l’entreprise ni, le cas échéant, au sein du groupe, parmi les entreprises situées sur le territoire national et dont l’organisation, les activités ou le lieu d’exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel ;
-le salarié a refusé le ou les propositions de reclassement qui lui ont été faites ;
-le médecin du travail a indiqué dans son avis que tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l’état de santé du salarié faisait obstacle à tout reclassement dans un emploi.
L’affaire : un salarié inapte licencié après avoir refusé plusieurs offres de reclassement
Dans cette affaire, un dépanneur-installateur avait été victime d’un accident du travail, qui avait débouché sur une déclaration d’inaptitude. L’employeur avait fait plusieurs propositions de reclassement, que le médecin du travail avait jugé compatibles avec l’aptitude résiduelle du salarié, mais ce dernier les avait refusées. Il avait en conséquence été licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement.
Le salarié avait alors saisi le conseil de prud’hommes pour obtenir des dommages et intérêts au motif que l’employeur ne lui avait pas notifié les motifs qui s’opposaient à ce reclassement.
Pas d’obligation d’information pour le salarié qui connaît les motifs qui s’opposent à son reclassement
Dans une position de principe, mais aussi de bon sens, la Cour de cassation approuve la cour d’appel d’avoir rejeté la demande du salarié et décide que l’employeur n’a pas à indiquer les motifs qui s’opposent au reclassement du salarié inapte lorsque celui-ci a refusé les offres qui lui ont été faites.
En effet, dans un tel cas, l’intéressé sait parfaitement pourquoi il n’a pas été possible de le reclasser.
En d’autres termes, l’obligation d’indiquer les motifs qui s’opposent au reclassement ne s’applique que s’il n’existe pas d’emplois disponibles ou lorsque le médecin du travail a expressément indiqué qu’il ne fallait pas chercher à reclasser le salarié.
Naturellement, cette exception à l’obligation d’informer le salarié des motifs qui s’opposent à son reclassement ne joue que si l’employeur a fait des propositions conformes aux prescriptions du code du travail, c’est-à-dire appropriées aux capacités du salarié et prenant en compte les conclusions écrites du médecin du travail (c. trav. art. L. 1226-2 et L. 1226-10).
Cass. soc. 24 mars 2021, n° 19-21263 FSPI
(source rf)