Discrimination syndicale: Un salarié discriminé durant toute sa carrière peut agir lors de son départ en retraite

14 avril 2021 | Actus

Le salarié victime d’une discrimination interdite peut saisir le conseil de prud’hommes sous réserve de respecter le délai de prescription (5 ans depuis 2008, 30 ans auparavant). Son action reste possible si les faits de discrimination n’ont pas cessé de produire leurs effets avant la période non atteinte par la prescription. C’est ainsi qu’une action pour faire reconnaître une discrimination syndicale depuis le début de la carrière professionnelle, intentée au moment du départ à la retraite, n’est pas forcément prescrite.

Interdiction des discriminations syndicales dans le déroulement de carrière

Aucun salarié ne peut être discriminé, notamment dans sa rémunération et dans sa carrière, en raison d’un critère discriminatoire tel que son appartenance syndicale ou son mandat syndical (c. trav. art. L. 1132-1 et L. 2141-5). Sont interdites les discriminations tant directes qu’indirectes.

Dans l’affaire jugée par la Cour de cassation le 31 mars 2021, une salariée engagée en 1976 avait été désignée représentante syndicale en 1977, et était devenue permanente syndicale à compter de 1997. Après son départ à la retraite en décembre 2011, elle avait saisi, le 10 avril 2012, le conseil de prud’hommes pour reprocher à son employeur une discrimination syndicale dans le déroulement de sa carrière.

Mais était-elle encore dans les temps pour intenter une action en justice ? Non, pour la cour d’appel.

Contentieux de la discrimination syndicale : l’enjeu de la prescription

La complexité de cette affaire tient au fait que la durée de la prescription pour arguer en justice être victime d’une discrimination a changé en 2008, soit durant la période d’activité de la salariée, et au fait que celle-ci est allée en justice longtemps après avoir pris conscience de sa discrimination.

En effet, avant l’entrée en vigueur de la loi 17 juin 2008, l’action en réparation du préjudice résultant d’une discrimination était soumise à la prescription trentenaire de l’article 2262 du code civil dans sa rédaction alors applicable (loi 2008-561 du 17 juin 2008, JO du 18)

La loi du 17 juin 2008 a réduit le délai de prescription pour le fixer à 5 ans (c. trav. art. L. 1134-5). Elle a également prévu que les dispositions qui réduisent le délai de la prescription s’appliquent aux prescriptions à compter du jour de son entrée en vigueur, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure (soit 30 ans y compris les 5 ans de la nouvelle prescription) (loi art. 26, II).

Ici, la cour d’appel a estimé que l’action de la salariée, intentée le 10 avril 2012, était prescrite depuis le 5 novembre 2011 et qu’elle était donc irrecevable.

Les juges d’appel ont fait partir le délai de prescription au 5 novembre 1981, date du courrier de l’inspection du travail en réponse à la plainte de discrimination adressée par la salariée. C’est à cette date, selon les juges, que la salariée avait eu connaissance de la discrimination. Ils ont donc ensuite appliqué le délai de prescription de 30 ans, pour le faire expirer au 5 novembre 2011.

Une action non prescrite tant que la discrimination dure au cours de la carrière

La salariée a contesté cette décision devant la Cour de cassation, estimant que son action, pour faire reconnaître une discrimination qui avait perduré jusqu’à son départ à la retraite le 1er décembre 2011, n’était pas prescrite.

La Cour de cassation lui a donné gain de cause.

Elle relève que, certes la salariée faisait état d’une discrimination syndicale ayant commencé en 1977, dont elle s’est plainte en 1981, et que cette période était couverte par la prescription trentenaire.

Mais la Cour retient que cette discrimination s’était poursuivie tout au long de sa carrière en termes d’évolution professionnelle (salariale et personnelle).

Pour les juges, la salariée se fondait sur des faits qui n’avaient pas cessé de produire leurs effets avant la période non atteinte par la prescription. Par conséquent, l’action de la salariée n’était pas prescrite et elle pouvait valablement saisir la justice.

Cass. soc. 31 mars 2021, n° 19-22557 FP

(souce rf)

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