Un employeur doit payer les heures de délégation incluses dans le crédit d’heures d’un représentant du personnel, y compris lorsqu’elles sont prises en dehors de l’horaire normal de travail et en sus du temps de travail. En revanche, il peut contester le caractère nécessaire des heures prises hors contingent et refuser de les payer.
Heures de délégation prises en dehors des horaires habituels
Un salarié élu représentant du personnel, et désigné délégué syndical et représentant de la section syndicale, réclamait le paiement d’heures de délégation prises en dehors de son temps de travail et non payées à l’échéance normale.
Il ressort des faits de l’espèce que durant plusieurs années le salarié avait quasi systématiquement effectué ses heures de délégation en dehors de son temps de travail ; beaucoup de ces heures étant même effectuées les dimanches.
Les bulletins de salaire versés aux débats montraient ainsi que ce salarié n’avait jamais subi aucune réduction d’heures sur ces heures mensuelles pour cause d’absence liée à ses mandats et qu’il avait été payé à de nombreuses reprises au titre d’heures supplémentaires, de dimanche, de nuit, directement liées à l’exercice de ses mandats.
L’employeur, qui contestait le caractère nécessaire des heures excédant celles dont le salarié avait déjà été payé, a obtenu gain de cause.
Paiement des heures de délégation, y compris en heures supplémentaires
La Cour de cassation, dans sa décision, du 16 décembre 2020, rappelle les règles de paiement des heures de délégation par l’employeur.
Celles-ci sont de plein droit considérées comme du temps de travail et rémunérées comme tel (c. trav. art. L. 2143-17), sachant que le crédit d’heures d’un représentant du personnel peut être pris en dehors de l’horaire normal de travail et en sus du temps de travail effectif lorsque les nécessités du mandat le justifient.
En pratique, cela implique que le salarié qui effectue ses heures de délégation en dehors de son horaire de travail devra recevoir le paiement d’heures supplémentaires.
Dans ces circonstances, si l’employeur a des doutes sur l’utilisation de certaines heures, il ne peut en saisir le juge qu’après avoir payé le salarié de ces heures. L’utilisation du crédit d’heures est, en effet, présumée conforme à son objet.
Dans cette affaire, les juges ont considéré que l’employeur avait parfaitement respecté ses obligations. Ils ont constaté :
-d’une part, que l’employeur avait payé le salarié à de nombreuses reprises au titre d’heures supplémentaires, de dimanche, de nuit, directement liées à l’exercice de ses mandats ;
-d’autre part, que les éléments produits par le salarié ne permettaient pas de déterminer celles des heures supplémentaires et des majorations dont il estimait ne pas avoir été rémunéré.
Il ne pouvait donc être reproché à l’employeur de ne pas avoir payé certaines heures de délégation entrant dans le contingent dont bénéficiait le salarié. Ceci d’autant plus que les juges ont constaté que les conditions de travail du salarié et les nécessités du mandat n’impliquaient pas que les heures de délégation soient systématiquement prises en dehors des horaires de travail, la nuit et le dimanche.
La Cour de cassation a validé ce raisonnement.
Droit de contester les heures de délégation prises au-delà du contingent
En matière de paiement des heures de délégation, la donne change lorsque l’élu a dépassé son nombre d’heures de délégation.
Comme le rappelle ici la Cour de cassation, l’employeur peut, dans ce cas, contester le caractère nécessaire de ces heures et refuser de les payer. Il appartient alors au salarié d’établir l’existence de circonstances exceptionnelles justifiant un dépassement de ses heures de délégation, de même que la conformité de l’utilisation des heures excédentaires avec sa mission (cass. soc. 25 novembre 1997, n° 95-43412, BC V n° 412).
Or, dans cette affaire, le salarié n’a pu justifier d’aucune circonstance exceptionnelle.
L’employeur n’était donc redevable du paiement d’aucune autre heure de délégation.
Cass. soc. 16 décembre 2020, n° 19-19685 D
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